Voilà deux ans que le Namazu a apporté le chaos au Japon. Plus je peins cet animal de malheur, plus je ressens le dégoût et la peur.
Le Namazu cristallise notre crainte de tous ces évènements imprévus, de ceux qui ne dépendent en aucune façon de notre volonté, mais qui peuvent pourtant transformer nos aspirations en un champ de ruines. Il s'agite sous la terre comme il remue dans notre estomac quand tout va mal. Il a le pouvoir de nous donner à vivre 5min de terreur, et de nous montrer combien nous sommes imbéciles de ne pas avoir su ressentir avec autant de force les autres minutes de notre existence. Après avoir disséminé sa terreur, le Namazu nous laisse libre d'éprouver la dimension dyonisiaque de la vie, et nous laisse face à deux routes disposées en miroir : celle qui conduit au recroquevillement, à l'apitoiement, à l'abandon, et celle qui amène au renouveau et à la jouissance de notre puissance vitale. Pour autant, je ne suis pas sûre d'avoir envie de lui dire merci...
Rigole, Namazu, rigole. Un jour, nous te capturerons. Ou alors, peut-être te laissera-tu apprivoiser ? En attendant, rien ne sert de s'impatienter. Pour calmer le Namazu qui habite dans mon estomac, ou qui vient comprimer mes valvules cardiaques, je tricote des lassos toujours plus longs.